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annonce : le lien père fille

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Message par Ydole 15/3/2008, 11:46 am

Relations père-fille

Les filles poursuivent longtemps l'image idéale du premier homme qu'elles ont aimé, leur père. Le psychanalyste Didier Lauru consacre son dernier livre à l'exploration de ce lien unique, dont il leur faut pourtant s'affranchir pour s'épanouir en amour.
Entretien
Didier Lauru : La réalité sociale a considérablement évolué. Les pères n'ont plus autant de pouvoir, ils partagent l'autorité parentale avec la mère, qui peut désormais transmettre son nom, et sont plus présents auprès des enfants. Mais dans le fantasme, il demeure le principal support de l'autorité. La grosse voix, les interdits, c'est lui.

Et les jeunes femmes que je reçois entretiennent l'idée qu'elles ont besoin de son approbation pour valider leurs choix, en particulier amoureux. Si elles se passent d'une autorisation formelle, elles ne veulent pas lui déplaire.
J'ai effectivement été frappé par l'insistance avec laquelle les femmes, sur le divan, évoquent le regard de leur père, au sens propre du terme. Comme si ce regard, tour à tour teinté d'amour ou de déception, d'admiration ou de réprobation, était une espèce de baromètre de leur relation. Comme s'il existait également un lien entre la qualité de ce regard et les difficultés qu'elles rencontraient dans leur vie amoureuse ou leur sexualité.
Ce que j'ai voulu montrer dans ce livre, à travers différents récits d'analyse, c'est comment le père, à la manière d'un sculpteur devant un bloc de pierre, anticipait la femme en devenir dans la petite fille et l'aidait à advenir. Son regard, plus ou moins valorisant, est ce qui l'autorisera à accomplir sa féminité ou, au contraire, l'en empêchera.
C'est elle qui, dans les premiers temps, donne à la petite fille la base de sécurité dont elle a besoin pour grandir, elle qui lui apprendra à être femme auprès d'un homme. Mais le père sera l'homme idéal de son imaginaire, celui dont elle cherchera le regard dans ses amours futures, ce premier regard d'un homme posé sur elle. Que son partenaire ressemble à papa ou qu'il soit exactement son contraire, c'est lui qui aura servi de référence.

Ce qui est compliqué pour le père, c'est de trouver ce regard qui contienne suffisamment d'amour pour permettre à sa fille d'avoir confiance dans sa capacité à séduire et de se construire comme sujet pensant, mais pas trop non plus pour ne pas l'empêcher de vivre sa vie et d'aimer ailleurs.

Ce « regard juste », c'est un regard d'amour filial, à la fois porteur d'un discours sur sa féminité naissante et garant de l'interdit de l'inceste. Un regard qui dit, avec ou sans mots d'ailleurs : « Tu es jolie, tu es intelligente, un jour tu pourras plaire à qui tu veux, tu pourras être aimée d'un homme qui ne sera pas moi. »

Le plus souvent, la fille en gardera une sorte de nostalgie, un besoin d'amour insatisfait. Plus tard, dans ses relations amoureuses, elle sera en demande permanente de quelque chose qu'elle ne pourra pas obtenir puisque ce qu'elle espère n'a précisément pas existé. Elle l'a fantasmé, idéalisé. C'est précisément pour dénouer ces énigmes-là que des femmes viennent en analyse.

A dessein, je ne parle pas de l'inceste dans ce livre, car c'est un autre sujet. Mais consciemment ou non, le regard d'un père sur sa fille est parfois équivoque. La plupart des pères ont fort heureusement intériorisé l'interdit de l'inceste et frémissent d'horreur à l'idée qu'il puisse être transgressé.

Il n'empêche qu'ils ont, comme les mères avec leurs petits garçons, à composer avec des désirs incestueux inconscients qui peuvent transparaître à leur insu. De son côté, du fait de ses propres désirs oedipiens et de son envie de lui plaire, la fille peut interpréter certains regards de son père comme des tentatives de séduction.

Si le père ne renonce pas à s'approprier sa fille, elle aura alors les plus grandes difficultés à se détacher de lui pour trouver un compagnon.
Les filles poursuivent longtemps l'image idéale du premier homme qu'elles ont aimé, leur père. Le psychanalyste Didier Lauru consacre son dernier livre à l'exploration
Tout dépend des raisons pour lesquelles il manque au tableau. Ce qui est compliqué lorsque le père meurt, en particulier quand sa fille est encore petite, c'est qu'elle n'a plus la possibilité, à l'adolescence, de le faire tomber de son piédestal. Et il arrive fréquemment que, devenue femme, elle choisisse un partenaire de l'âge qu'aurait son père ou de l'âge auquel il est mort, signe qu'elle reste attachée à une certaine image de lui.
Quant aux filles qui ont été abandonnées par leur père, beaucoup grandissent dans l'idée qu'elles n'ont pas su le retenir, et qu'aucun homme ne pourra jamais les aimer puisqu'elles ne sont pas aimables aux yeux de celui-là.

La « désidéalisation » du père est en tout cas une étape nécessaire de leur parcours amoureux. Tant qu'elles chercheront chez leur partenaire l'image du premier homme qu'elles ont aimé, elles ne pourront qu'être déçues dans tous les points où la réalité s'écarte de l'idéal.
D'où ces reproches si fréquents dans les premières amours. Or cet homme idéal qu'elles poursuivent n'existe pas, il n'est qu'une construction imaginaire élaborée à partir d'un trait censé incarner le père : sa moustache, son amour du jazz...

C'est parvenir à voir le père réel derrière l'image. C'est aussi, au-delà de ça, renoncer à être celle qui comble son désir. Car la fille s'identifie, elle aussi, à l'image idéale du père. Elle s'efforce inconsciemment de lui ressembler, d'être à sa hauteur.

Pour les filles de pères illustres, la tâche est d'autant plus compliquée que le père est idéalisé publiquement. Mais beaucoup y parviennent, si le père consent à n'être pour elles qu'un piètre père, un homme parmi d'autres.
Il n'y a pas de réponse simple à cette question. Ce qui est certain, c'est que les femmes n'ont plus besoin des hommes pour leur survie matérielle. Tant qu'elles ont plaisir à leur indépendance, il n'y a rien à dire. C'est lorsqu'elles se heurtent toujours au même mur que l'on peut repérer quelque chose d'une incapacité à se détacher d'un idéal qui les conduit vers des histoires sans lendemain.

Typiquement, oui. La figure de la maîtresse a toujours existé, il n'y a qu'à voir le théâtre de boulevard. Mais aujourd'hui que les couples se séparent plus facilement, se retrouver dans cette situation n'est pas juste un concours de circonstances. C'est une configuration qui rappelle la triangulation oedipienne.

Ces femmes de l'ombre, qui passent toujours après la « légitime », sont pour la plupart des filles qui n'ont eu accès à leur père que par l'intermédiaire de la mère. Elles n'ont pas pu éliminer fantasmatiquement leur rivale et continuent de mettre une femme entre les hommes et elles.
D'autres stratégies inconscientes visent à ne laisser aucun homme détrôner le père : le fait de sacrifier les relations amoureuses à une carrière brillante, de ne pas réussir à faire un enfant avec son compagnon...

Tant qu'elles ont plaisir à leur indépendance, il n'y a rien à dire. C'est lorsqu'elles se heurtent toujours au même des histoires sans lendemain.

Ce que j'avais envie de montrer à travers les cas regroupés dans ce livre, c'est comment le travail analytique pouvait être un tournant. Il y a d'abord ce dispositif unique : l'analysant allongé, l'analyste assis derrière lui. Freud confessait que le regard des patients lui était difficile à supporter. Il était convaincu de pouvoir écouter mieux s'il n'était pas observé.
De mon côté, je trouve intéressant que les patientes dont je parle, soustraites au regard de l'analyste, évoquent précisément ce regard paternel qui les a marquées. Par ailleurs, le travail d'interprétation des lapsus, des rêves ou des séances manquées n'a pas son pareil pour éclairer des schémas inconscients.

C'est ainsi que, pendant de nombreuses séances, les filles, quel que soit leur âge, pleurent l'amour qu'elles n'ont pas reçu du père. Un beau jour, au terme d'un long travail de déconstruction de leurs fantasmes, et en particulier de l'image idéale du père, elles comprennent que c'est en refusant de répondre à leur demande d'amour absolu qu'il leur a offert la liberté de construire leur propre vie.
Elles peuvent alors renoncer à lui et s'appuyer sur le capital d'amour et de confiance en soi omplexe et singulière, dont il influence les choix de la jeune femme devenue adulte qu'elles ont acquis sous son regard pour oser rencontrer et aimer un autre homme.

L'une a peur des hommes, l'autre danse pour éveiller leur désir, une troisième se contente d'être la femme de l'ombre... Chacune, sur le divan, revient sur ses premières amours pour éclairer les suivantes. Derrière l'amant, cherchez le père.
A travers des récits d'analyse, Didier Lauru explore le lien père-fille et la manière, toujours complexe et singulière, dont il influence les choix de la jeune femme devenue adulte
Ydole
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